JACQUES COEUR

«En construction, un peu de patience... merci de votre compréhension .»

 

 

:: Jacques CŒUR est né entre 1395 et 1400, au cœur de la Guerre de Cent ans. En quelques années, le petit pelletier de Bourges devient monnayeur lors de l’épopée de Jeanne d’Arc, argentier, armateur, financier, ambassadeur, homme d’affaires prospère, créateur de nombreux comptoirs commerciaux en France, en Europe, en Orient. Législateur, bâtisseur, négociant, il reçoit le monopole d’importation des épices et du transport des marchandises françaises vers les ports musulmans. Anobli en 1441 et nommé commissaire aux états du Languedoc, il est nommé conseiller du Roi pour la première fois en 1442. En 1449, il avance la somme de 100.000 livres à Charles VII pour financer les campagnes de reconquête de la Normandie qui permettront de mettre fin à la guerre de Cent Ans. Il entre à cheval dans Rouen reconquise dans le cortège du Roi. En 1450, pour la victoire de Formigny, Jacques Cœur négocie la reddition de Cherbourg. En 1451, il avance au Roi plus de 70.000 livres pour la reconquête de la Guyenne. Après la mort d’Agnès Sorel, la Dame de Beauté, son amie et alliée, qui en fait l’un de ses exécuteurs testamentaires, il est accusé, par ses ennemis et débiteurs, de l’avoir empoisonnée. Arrêté le 31 juillet 1451, il est emprisonné sans  procès équitable, torturé. Ses biens sont confisqués. Sa famille est dépouillée de tout. Sa femme meurt de désespoir. Ses amis et associés proches sont poursuivis ou emprisonnés.

:: Grâce à la fidélité de ses associés, Jacques Cœur s’enfuit du château de Poitiers en octobre 1454. Protégé dans sa fuite, il rejoint le couvent des Cordeliers de Beaucaire où il échappe à une attaque des hommes du Roi qui tentent de l’empoisonner. Jean de Village, son bras droit, devenu son neveu par alliance, viguier de Marseille, l’aide à passer le Rhône. Il arrive enfin à Rome, protégé par l’amitié du Pape qui refuse de le livrer au Roi de France. Succédant à Nicolas V, Calixte III part en guerre contre les Turcs qui se sont rendus maîtres de Constantinople et menacent les îles chrétiennes de l’archipel grec. Jacques Cœur devient le conseiller et le financier de l’expédition. Tout naturellement, il en devient l’un des capitaines généraux. L’expédition est constituée d’une flotte de onze trirèmes destinées à libérer les îles de Chypre, Lesbos, Lemnos et Rhodes. Lors de la bataille de Rhodes, il est blessé. On le déclare mort à Chio le 25 novembre 1456, le jour de Sainte Catherine, la sainte qu’il vénérait et qu’il avait fait représenter sur les vitraux de sa chapelle, dans la cathédrale de Bourges.

:: On ne retrouvera jamais sa tombe dans l’église des Cordeliers, à Chio, « auquel lieu est pareillement ensépulturé feu Iaques Cueur dedans le milieu du chœur de la dite église ».  Les circonstances de son décès restent mystérieuses. En réalité, il n’existe aucune preuve historique de sa mort à Chio, île d’un archipel où la tradition des Frères hospitaliers guérisseurs est présente dans une région où il avait de nombreux alliés. (Parmi ses nombreuses missions diplomatiques, il était intervenu en 1445, près du « Soudan d’Egypte », en faveur des chevaliers de Rhodes.) Sa supposée sépulture dans l’église de Chio ramène encore à la confrérie des Cordeliers, ceux-là même qui avaient protégé sa fuite hors du royaume de France.

:: Avant sa mort « supposée », il a, cependant, le temps d’adresser à Charles VII une missive  « pour lui recommander ses enfants et le supplier humblement qu’eu égard aux grands biens et honneurs qu’il avait eus en son temps autour de lui, ce fût son bon plaisir de leur donner autre chose, afin qu’ils pussent, mêmement ceux qui étaient séculiers, honnêtement vivre sans nécessité ». Cette mort tombe à point. N’ayant plus rien à craindre de l’homme dont la grandeur, après l’avoir servi, lui faisait ombre, le Roi pardonne. L’heure de la clémence royale sonne. Jean de Village avait participé à la libération et à la fuite de Jacques Cœur. Il s’était enfui à Rome, mais sa femme et ses enfants avaient été emprisonnés et leurs biens confisqués. Le Roi leur accorde sa clémence.  Le 5 août 1457, le Roi restitue aux deux enfants de Jacques Cœur, Ravand et Geoffroy, la « grande maison que leur père avait fait faire à Bourges, avec ses appartenances et dépendances, ensemble le ménage et ustensiles qui étaient dedans, tant de bois que de cuisine » (tous les objets précieux n’ayant pas disparu après l’arrestation ayant été saisis…), ainsi que « de toutes autres maisons, places, jardins et rentes assises en ladite ville de Bourges, vignes, terres, près et autres héritages assis à l’entour de la dite ville, et généralement au pays de Berry, qui n’avaient été adjugées par décret et délivrées par ceux qui les avaient mis à prix. »  

:: Le 11 mai 1459, des lettres de rémission sont rédigées pour les principaux facteurs de l’Argentier, dont les Frères Noir, connus pour avoir recélé une partie importante des biens de Jacques Cœur pendant la liquidation. Entre-temps, les ennemis de Jacques Cœur, dont le plus acharné est le nouvel Argentier, Otto Castellani, sont à leur tour accusés de trahison, emprisonnés, torturés, dépossédés par Charles VII. Celui-ci, devenu paranoïaque jusqu’à refuser de s’alimenter, meurt le 22 juillet 1461.  Son fils, Louis XI, continue de restituer à la famille Cœur certains biens de l’Argentier, dont le château de Saint Fargeau.

:: L’histoire n’a jamais fini de révéler les multiples facettes d’une vie. Chio est dans l’aura des Frères Hospitaliers et des Cordeliers qui ont protégé la fuite de Jacques Cœur. L’Argentier est un organisateur né, un diplomate parfait. La date de sa mort est, en elle-même, l’indice d’une « sortie » bien orchestrée de l’histoire. Un retour à Rome, puis Marseille, territoire du Bon Roi René, indépendante du royaume franc, ne présente aucune difficulté. Jacques Cœur, bien avant son arrestation, y avait déjà transféré les activités de ses galées en abandonnant Montpellier. Tout le trajet est balisé. Les écrits d’Eugène Canseliet, alchimiste érudit, disciple de Fulcanelli, très sensible au sort de l’alchimiste argentier, m’ont guidée jusqu’à ce petit village du Midi provençal qui porte encore le nom ancien du petit pelletier, jusqu’à la petite église qui pourrait porter la « signature » de l’Argentier, dans ce qui était, au Moyen Age, un village fortifié, Castrum Cuerri, qui avait prouvé sa fidélité à la Reine Jeanne et  où personne n’aurait pensé venir le chercher. Le pays choisi est sous la protection du Roi René. Ce dernier achètera, à la même période, le château de Gardanne, dans le Massif de l’Etoile, près d’Aix en Provence, comme pour s’en rapprocher, et y effectuera, dès 1457, de nombreux séjours, écrivant dans ses moments de loisir, après la mort de Charles VII, une ode au « Cuer d’Amour espris », qui pourrait bien être une allégorie de la vie de Jacques Cœur, jusqu’à « l’église édifiée sur la roche de diamant où Cuer et Désir accostent, atteignant enfin « l’Hospital d’Amours » où la « doulce Mercy» prendra soin de lui.

:: L'Argentier alchimiste a-t-il passé les dernières années de sa vie dans le village de Cuers, y soignant les blessures de son âme meurtrie, gravant dans la pierre les cœurs glorieux de son passé, peignant de sa main, à la croisée d’ogives au-dessus de l’autel, la coquille lys bleutée, accompagnée du cœur et de deux clés ? Cette coquille est de même couleur que la coquille, rongée par l’humidité située dans l’entrée du couloir de l'hôtel des Trésoriers de France, construit par Jacques Cœur à Montpellier (maintenant restaurée). Une statue de Sainte Catherine d’Alexandrie, la sainte qu’il affectionnait, a été trouvée dans l’église de Cuers, seul exemple de statue de marbre blanc du XVème siècle de ce département. Elle a sans doute été décapitée à la Révolution, comme pour mieux taire son secret. Quel étrange pressentiment d’un destin brisé à l’image de son emblème l’avait fait élire par Jacques Cœur ? La statue était accompagnée d’une tête de Saint Pierre, de la même période, rappelant Rome qui donna à Jacques Cœur une seconde gloire. L’étoile à six branches qui figure sur le blason mi-parti de l’Argentier, unissant Jacques Cœur et Macée de Léodepart, sa femme, alliant coquilles, cœurs et l’Etoile du compost alchimique, la CompoStella, se retrouve sur le blason gravé sur le médaillon à la croisée d’ogives d’une chapelle de l’église. Les historiens pensent qu’un homme célèbre est passé dans cette église, sans savoir lequel. S'agit-il de Jacques Coeur ? L’église, aujourd’hui Collégiale Notre Dame, avait été consacrée à Sainte Catherine d’Alexandrie en 1524.

Joëlle Pellegrin Oldenbourg, le 26 Novembre 2.005.

 

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